Aujourd’hui, nous aimerions vous partager le témoignage touchant d’Emilie Duval. « Je tiens à remercier l’association de son existence et de la chance qu’elle offre à tous ces enfants qui pourront être libre d’exister pleinement grâce à elle »
« J’ai longtemps occulté cette partie de ma vie.
Le mutisme scolaire s’est imposé à moi à l’âge de 7 ans suite à un déménagement. Le contraste campagne/ville a été brutal pour moi et le silence ma solution.
Chaque jour à l’école aucun son ne sortait de ma bouche. Cela a duré presque 3 ans. Trois années de souffrance. Maitriser mes émotions, mes gestes me demandaient un effort surhumain. Je luttais contre moi-même. Ne pas parler pour ne pas attirer l’attention, ne pas interagir avec les autres et donc me protéger. Cette bulle protectrice est devenue au fil des jours impossibles à briser. Je m’étais enfermée, seule, dans une prison de souffrance. La douleur de ne pas être soi-même, cette sensation de ne pas réellement exister, la douleur d’être différente des autres, de se sentir intitule, triste et terriblement seule. Le soir, dans mon lit d’enfant, les larmes coulaient souvent, toujours en silence.
La honte, la culpabilité, la peur me paralysaient. J’étais bloquée. Mon corps ne m’appartenait plus. Je devais me faire violence chaque jour pour conserver ma posture. Je me souviens de ce jour ou plusieurs élèves de ma classe s’amusaient à me pincer pour voir si j’allais réagir. C’était une expérience si on peut dire… j’ai lutté de toutes mes forces pour ne pas émettre un son ou un cri de douleur. J’ai réussi.
Cet épisode de ma vie, bien enfoui depuis plus de 30 ans a ressurgi il y a peu lorsque ma fille a été confronté à des difficultés scolaires. Je me suis vue en elle et la souffrance est réapparue, intacte. Depuis, j’essaie de comprendre, d’en parler mais les mots sont difficiles et restent bloqués, encore… c’est pour cela que je souhaite m’exprimer par écrit. Et puis l’écrit permet selon moi, d’exprimer au plus juste ce que l’on ressent. Les mots sont choisis, maitrisées, posés, ils ne sont pas parasités par un regard, une attitude ou l’interprétation parfois inapproprié d’un geste.
Je suis sortie seule de ce mutisme à l’entrée au collège. Nouvel établissement, nouveau départ ! Je me souviens très bien de ce jour, j’étais décidé, il le fallait ; ET J’AI PARLÉ ! La délivrance, enfin.
Mon parcours scolaire aura été pour moi une épreuve : lever la main, lire un texte à voix haute, parler devant un groupe… tout cela était très difficile mais je me suis fait violence et les mots sont « sortis ». Et pourtant… si seulement,
Si seulement une personne ; médecin, spécialiste ou autres m’avaient expliqué ce qui se passait en moi,
Si seulement on m’avait apporté des solutions,
Si seulement on s’était intéressé à moi,
Si seulement…
Depuis la connaissance de cette association, j’ai lu l’ensemble des témoignages avec émotions et soulagement et j’ai aussi compris pourquoi ! l’explication, la compréhension : « le mutisme sélectif est un trouble anxieux de l’enfance qui se caractérise par l’incapacité de l’enfant à parler dans certaines circonstances… ». Voilà ! les mots sont posés, ils soulagent et surtout des solutions existent. Du temps pour me familiariser avec ce nouvel environnement et travailler sur ce fameux « pont » famille/école auraient sans doute suffit à « ouvrir ma voix ».
J’étais une petite fille sensible, timide, anxieuse et je le suis encore mais j’apprends sur moi et j’avance.
Je tiens à remercier l’association de son existence et de la chance qu’elle offre à tous ces enfants qui pourront être libre d’exister pleinement grâce à elle.
Emilie Duval ».